Le thème que je vais développer s'écarte légèrement de la pratique méditative orthodoxe, mais ce n'est que pour mieux y revenir ensuite.
Une des deux postures méditatives de base - Vipassana - vise à laisser venir tout ce qui parvient à l a consciences sans chercher à écarter ou repousser quoi que ce soit. Or dans ces moments il se peut que des problèmes non résolu fassent surface. L'esprit au repos est alors dans une disposition nouvelle pour accueillir ces données mentales. Lorsqu'une telle pensée insistante se manifeste, j'ai fait le choix de la laisser grandir et disparaître d'elle-même, souvent lorsqu'une issue ou solution arrive. Cette posture reste à mon avis méditative dans la mesure où il n'y a pas de visée consciente ou volontaire à rechercher une solution comme on pourrait le faire en état de réflexion habituel. Ici le cheminement de la pensée se déroule de lui même sans l'intervention du sujet, moi en l'occurrence !
Ceci s'écarte légèrement de la méditation orthodoxe dans la mesure où il n'est pas certain que la pleine conscience demeure lorsque ce cheminement mental se déroule et que pour ce faire il s'agirait de revenir à la deuxième posture méditative - Shamata - du focus attentionnel sur les sensations corporelles telles que le souffle.
Je considère toutefois qu'interrompre ce cheminement naturel serait plus source d'agitation que de de paix mentale, c'est pourquoi j'opte, surtout en début de méditation, pour laisser les pensées qui veulent s'exprimer le faire sans forcément les écarter. J'utilise ici une façon de parler personnifiante à propos des pensées car tout semble se passer comme si elles avaient une vie propre indépendante du sujet qui les pense, ou de moins de sa volonté consciente.
Envisageons maintenant ce phénomène sous l'angle neuroscientifique. Lors d'une tentative de résolution de problème par la réflexion notre cerveau fait appel au cortex pré-frontal pour diriger la pensée là où il veut aller, c'est le substrat organique du contrôle cognitif. Or il s'avère que ce contrôle cognitif, tout utile qu'il soit, présente aussi des désavantages, et c'est là où j'arrive au cœur de ma réflexion : le contrôle cognitif limite l'accès à la créativité, de par le rôle inhibiteur du cortex pré-frontal qui filtre les pensées cratives (cf. Le Monde de l'intelligence, avril - mai 2013, p. 6).
Ainsi la posture méditative de par son ouverture à ce qui est, n'opère par définition aucun choix et constitue de la sorte un relâchement complet de contrôle cognitif habituel. La pensée se voit ainsi libérée d'une forme de carcan neurophysiologique qui la pousse dans une seule direction et c'est alors que l'idée inattendue arrive.
Ceci étant dit il serait vain de vouloir méditer "pour" résoudre certains problèmes car nous serions alors définitivement sorti de la logique méditative qui n'a pour unique finalité que d'être avec ce qui est dans le moment présent...